A la télé Zemmour se plante

Chronique de Paysan Savoyard

(n° 286 – Décembre 2022)

Les 2,5 millions d’électeurs d’Eric Zemmour, qui sont aussi peu ou prou ceux qui participaient aux Manifs pour tous, forment un noyau dur important, militant, politisé, conscientisé, informé, déterminé. Ils constituent la partie la plus saine et la plus vivante de la société française, son élite véritable. En témoignent la mobilisation sans faille des militants de Reconquête, l’enthousiasme dans les meetings, les fortes audiences sur CNews ou les chiffres de vente des livres d’Eric Zemmour. Mais cet élan remarquable ne doit pas abuser : au-delà de ce cercle de militants et d’électeurs mobilisés, Eric Zemmour chez les Français moyens reste peu connu. Son image est celle d’un journaliste parisien et d’un intellectuel. Il n’apparaît pas à ce stade comme un président potentiel.

Le boycott des grands médias à l’égard d’Eric Zemmour est efficace et ce ne sont pas ses interventions sur CNews, aussi brillantes fussent-elles, qui lui permettront de s’adresser au plus grand nombre. Les seules occasions de susciter l’intérêt des Français moyens, ce sont les apparitions sur les chaînes grand public : BFM et les JT des grandes chaînes.

La difficulté est qu’à chaque fois qu’il intervient dans ce cadre, E. Zemmour se plante. Son style de communication est parfait pour les chaînes type Cnews, lorsqu’il s’adresse à un public à la fois averti et bien disposé à son égard : mais il est à côté de la plaque lorsqu’il s’agit de s’adresser au grand public. E. Zemmour s’était déjà planté dans les 2 ou 3 JT dans lesquels il avait pu intervenir au cours de la campagne présidentielle. Il vient de récidiver sur BFM.

Comment mieux réussir à l’avenir pour convaincre les Français moyens téléspectateurs ? Il faut d’abord avoir bien conscience du jeu des journalistes. Pour neutraliser E. Zemmour, ils emploient plusieurs techniques, aussi simples qu’efficaces. La première, la plus éprouvée, consiste à l’interrompre sans cesse, pour l’empêcher d’exposer ses analyses. La deuxième est de s’adresser à lui avec un ton et des mimiques à la fois ironiques, méprisantes et indignées, dans le but de faire comprendre à l’auditeur que les positions de Zemmour sont d’une part ineptes et risibles et d’autre part moralement condamnables. La troisième technique est de faire porter l’échange le plus possible sur des questions secondaires et techniques, afin d’empêcher E. Zemmour de centrer ses développements sur les thèmes de son choix. La quatrième s’applique aux thématiques les plus sensibles de l’immigration, de la remigration et de la race. Elle consiste à placer E. Zemmour devant une alternative dont les deux branches seront pour lui préjudiciables : soit prononcer des mots radicaux et « scandaleux », qui permettront aux journalistes de se récrier, de s’agiter et de créer le buzz, tout en fournissant après l’émission l’aliment d’accusations médiatiques nouvelles voire de poursuites judiciaires ; soit faire profil bas et reprendre plus ou moins à son compte le discours dominant, rendant alors son propos sans impact. Additionnées, ces différentes techniques ont jusqu’ici permis de ruiner efficacement les quelques interventions d’E. Zemmour sur les chaînes de télé grand public.

La récente émission de BFM a illustré à merveille le piège à chaque fois tendu, recelant tous les ingrédients de la technique de destruction médiatique : les interruptions permanentes des journalistes ; leur ironie, leur condescendance, leur mépris ; le centrage de l’interview sur les seules questions d’actualité : foot, énergie, retraite, fin de vie… Les journalistes ont aussi multiplié les insinuations et les questions pièges sur l’immigration, en particulier sur l’équipe de France, dans le but de pousser E. Zemmour soit à prononcer des phrases « scandaleuses », soit à faire couler un robinet d’eau tiède politiquement conforme. C’est la seconde solution qu’E. Zemmour a choisie au sujet du foot, acceptant de réciter de façon humiliante, en répondant aux objurgations des journalistes en pleine jubilation, les noms des joueurs noirs de l’équipe de France. Lorsqu’à la toute fin, E. Zemmour a tenté de placer un propos plus circonstancié sur la question de l’immigration, l’animateur l’en a empêché, en claironnant pour couvrir sa voix des « Merci Monsieur Zemmour » triomphants et dominateurs. Echec et mat, une fois de plus…

Pour tenter à l’avenir de se tirer de ces pièges, il faut à notre avis changer complètement de style de communication et choisir le registre de la rupture.

  • Lors des émissions grand public il faut cesser de jouer le jeu

E. Zemmour a tort de donner l’impression d’une certaine connivence avec les journalistes, en les appelant par leur nom et prénom. Plus fondamentalement, il a tort de « jouer le jeu » des émissions auxquelles on l’invite, en laissant les animateurs les conduire à leur guise. Au contraire il faudrait, calmement et fermement, installer une situation de combat et de rupture : « Je vais expliquer ce qui se passe aux auditeurs. BFM appartient à M. Drahi, qui est un milliardaire et qui est l’un des soutiens importants de M. Macron, comme presque tous les autres milliardaires. TF1, propriété du milliardaire Bouygues, est aussi une chaîne Macron. Quant aux chaînes publiques, la 2 et la 3, elles répondent directement aux ordres de l’Elysée. Donc les journalistes de BFM et des autres chaînes sont là pour être serviles avec Macron et son gouvernement et hostiles avec les autres, en particulier ce qu’ils appellent l’extrême-droite et en particulier moi. Donc ils vont passent leur temps à m’interrompre et à me couper. Et surtout ils veulent m’embarquer sur des sujets qui ont leur intérêt mais qui sont secondaires, pour m’empêcher de parler de l’essentiel : l’invasion du pays. Alors moi je veux vous parler de l’essentiel : l’invasion du pays ».

Les journalistes bien entendu l’interrompront et chercheront à l’empêcher, par le brouhaha et les exclamations, de tenir ce propos de façon intelligible. Il faut alors répondre, sans bien entendu perdre son calme et sans soi-même interrompre les journalistes : « Vous voyez comment ils procèdent. Ils sont en train d’illustrer ce que je viens d’expliquer ». Et ajouter « Je suis un responsable politique qui représente 2,5 millions d’électeurs : il n’est pas normal que je sois empêché de m’exprimer comme je l’entends, par des journalistes payés par les milliardaires amis du pouvoir ». De même il faut répéter calmement autant de fois que nécessaire : « Je veux pouvoir parler librement et sans être interrompu de l’essentiel : l’invasion du pays ».

Dans ses vœux à la presse en janvier 2022, Zemmour avait décrit crûment le comportement des journalistes et les avaient dénoncés, brillamment et violemment. Son discours était hautement pertinent, mais il était resté confidentiel. Dans les émissions grand public, Zemmour a choisi au contraire jusqu’à présent de jouer le jeu : il a tort, nous semble-t-il.

  • Refuser de se laisser enfermer dans les sujets techniques et d’actualité

Le rôle des journalistes consiste à enfermer E. Zemmour dans les sujets d’actualité et celui-ci se laisse piéger à chaque fois. Il s’embarque dans des explications détaillées, techniques, parfois un peu hésitantes et obscures, avec le souci de convaincre et d’expliquer. C’est une erreur. Il faut en une ou deux phrases brèves mettre l’accent sur un point simple à comprendre et ramener tout de suite au sujet essentiel, l’invasion, qui seul justifie l’action personnelle de Zemmour et l’existence de Reconquête.

Exemple, sur l’énergie : « Il y a encore 10 ans, nous étions autonomes, nous vendions de l’électricité à l’étranger et elle était peu chère. Aujourd’hui nous sommes dépendants, nous devons acheter à l’étranger et elle est chère. Macron, qui a voulu réduire le nucléaire de 50 % pour passer un accord électoral avec les écologistes, est responsable. Il a changé d’avis depuis mais nous avons perdu dix ans ». Et c’est tout. Si les journalistes insistent et le relancent : « J’ai dit ce que j’avais à dire : M. Macron est responsable. Je veux maintenant passer au sujet essentiel, le grand remplacement ».

Sur l’école : « Le niveau est effondré. L’école est maintenant le lieu de la violence et le lieu de l’islamisation. Tout cela est pour l’essentiel une conséquence de l’immigration, du grand remplacement, de l’invasion du pays. C’est de cela que je veux donc parler maintenant ».

Sur le pouvoir d’achat : « Le pouvoir d’achat est plombé par le montant énorme des impôts, taxes et cotisations sociales. Parce qu’il faut financer le chômage résultat des délocalisations et parce qu’il faut financer l’immigration, qui est un gouffre. Arrêtons l’invasion et nous diminuerons les impôts et pourrons redonner du pouvoir d’achat. Je vais donc parler maintenant de l’essentiel : l’invasion du pays ».

Sur les retraites : « Il faut sans doute repousser l’âge parce que la population active n’est plus assez nombreuse pour financer les retraites par répartition. On nous avait dit pendant des années que le système de retraite serait financé par les immigrés. Ils sont aujourd’hui entre 18 et 20 millions et le système de retraite est toujours en déficit. Je vais parler maintenant de l’invasion, qui est le sujet essentiel parce qu’il est vital ».

 « Tous ces sujets sont importants, certes, parce qu’ils touchent à la vie des Français. Mais ils sont moins importants que l’invasion. Lorsque le pays sera envahi, il ne sera plus question de retraite, de pouvoir d’achat ou d’énergie : nous serons devenus le tiers-monde ».

« Vous me coupez parce que vous n’avez pas envie que les auditeurs entendent ce que je veux leur dire ».

« Vous me coupez mais quand ce sera un ministre de Macron vous vous montrerez serviles et obséquieux, comme des valets ».

En revenant toujours au sujet, E. Zemmour parviendra nécessairement à faire entendre de façon intelligible et claires quelques phrases-clé, articulées autour de l’essentiel : « nous sommes en train d’être envahis ».

  • Sur l’immigration, choisir le registre de la rupture

Concernant l’immigration, il faut cesser de jouer au plus fin avec les journalistes. En s’efforçant de tenir des propos mesurés et en reprenant à son compte certains éléments du discours dominant, on ne fait que renforcer celui-ci. C’est ce que fait depuis des années Marine Le Pen, qui a passé son temps à donner des gages, avec l’espoir de se dédiaboliser. C’est l’échec. Elle est toujours diabolisée. Elle ne gagne pas. Et par son discours politiquement conforme elle renforce le Système.

Il faut procéder à l’inverse : « Non je ne soutiens pas l’équipe de France, parce qu’elle est composée en majorité d’immigrés, la plupart musulmans qui plus est. Je n’ai rien contre les joueurs à titre individuel et certains sont de bons joueurs. Mais l’équipe de France d’aujourd’hui incarne notre remplacement. L’équipe de France est l’étendard du Système, qui veut imposer la société multicolore, la société black-blanc-beur, c’est-à-dire la société où les Blancs vont devenir minoritaires dans leur propre pays, comme ils sont déjà minoritaires dans leur équipe nationale ».

Au-delà du sujet du foot, il faut mettre en avant, calmement mais sans détours, les trois points essentiels : le pays est envahi ; si l’invasion se poursuit nous allons disparaître ; l’invasion est organisée par la classe dirigeante.

« Le pays est en train d’être envahi par l’Afrique et l’Orient. Les immigrés non européens sont déjà 18 à 20 millions et l’invasion se poursuit à un rythme effréné d’au moins 500.000 immigrés supplémentaires par an, en comptant l’immigration légale, l’immigration illégale et les naissances ».

« La France et l’Europe appartiennent aux Blancs. Si l’invasion se poursuit, les Blancs seront mis en minorité sur leur propre sol. La civilisation européenne disparaîtra. La France et l’Europe deviendront progressivement le tiers-monde ».

« La classe dirigeante, en France et dans les autres pays d’Europe, souhaite le grand remplacement ou refuse de s’y opposer. Pour deux raisons. Parce que les capitalistes ont intérêt à un monde sans frontières, afin que les usines s’installent là où c’est le moins cher et afin que, dans les secteurs d’activité non délocalisables, les patrons puissent recruter la main d’œuvre la moins chère possible. Donc premier motif de la politique sans-frontiériste et immigrationniste : le profit. Deuxième motif : l’idéologie sans frontiériste. Les progressistes pensent qu’un monde sans frontières sera plus juste, plus pacifique, moins raciste. C’est une illusion complète et elle va entraîner notre disparition. Je résume : la politique sans frontiériste et immigrationniste de la classe dirigeante est une politique de trahison. Nous sommes envahis parce que nous sommes trahis ».

  • Mettre les Français directement en cause

Les Français sont massivement passifs et résignés, anesthésiés par le discours lénifiant du pouvoir et des médias. Pour espérer les faire sortir de leur apathie il faut les mettre en accusation.

« Vous les Français de souche, vous êtes responsables. La plupart d’entre vous ne faites strictement rien pour vous opposer à l’invasion. Vous ne votez pas pour le seul candidat dont le programme est d’arrêter l’invasion. Vous faites semblant de ne rien voir, alors que vous savez parfaitement que les choses tournent à la catastrophe. La preuve, vous essayez d’habiter dans un quartier ou un village où il n’y a pas d’immigrés. La preuve, vous essayez de scolariser vos enfants là où il n’y a pas d’immigrés. La preuve, vous partez en vacances dans les endroits où il n’y pas d’immigrés. Ce n’est pas vous, certes, qui êtes à l’origine des politiques d’immigration et de trahison : mais en en faisant rien, en ne disant rien et en faisant semblant de ne pas voir, vous en êtes des complices ».

« Vous assistez sans rien dire aux événement les plus graves, de plus en plus graves : l’islamisation galopante du pays, les drapeaux étrangers déployés dans les rues, les émeutes quotidiennes, les commissariats attaqués, les pompiers attirés dans des guet-apens, les Français de souche poignardés, les personnes âgées volées, agressées, violées, massacrées à coup de pied. Vous faites semblant de ne rien voir, hypocritement et lâchement vous détournez le regard, vous ne dites rien, vous ne faites rien ».

« Vous pouvez pourtant renverser la situation. Pour encore quelques temps, les Français de souche sont encore majoritaires. Le pouvoir de ceux qui nous trahissent repose entièrement sur votre complicité, sur votre aveuglement volontaire, sur votre silence, sur votre passivité. Si vous cessez de faire semblant, si vous dites la vérité autour de vous, si vous changez votre vote, si vous décidez de ne plus être complices, alors le pouvoir des traîtres s’écroule ».

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Avant de conclure, ajoutons qu’il faut aussi travailler le leadership et le style présidentiel. Au-delà du discours et des propos tenus, la communication non verbale est évidemment essentielle. Le style présidentiel suppose bien sûr le calme et l’absolue maîtrise de soi-même. Pas de sourire. Pas de mimiques. Se garder de couper soi-même les journalistes et d’entretenir volontairement le brouhaha. Les propos doivent être très durs, mais prononcés de façon parfaitement maîtrisée. Il faut en outre créer une impression de distance et de position surplombante, vis-à-vis des journalistes comme des auditeurs. Par exemple, J. Bardella ne dit que des choses stéréotypées et apprises par cœur : mais il a adopté le style qui convient (faut-il préciser que nous serions nous même bien incapable de mettre en application les bons principes que nous énumérons : le propos de cette chronique n’est donc en aucune manière de « faire la leçon » à E. Zemmour, dont nous admirons l’énergie, l’intelligence et l’honnêteté).

En un mot, pour finir, la communication de rupture consiste à articuler toutes les interventions autour des mots-clés « invasion », « disparition », « tiers-mondisation », « trahison », « complicité des Français de souche passifs et résignés ». Ces mots, les Français de souche en question ne les entendent jamais. Si la situation leur était ainsi présentée crûment, une partie d’entre eux pourraient peut-être sortir de leur passivité.

Une telle stratégie de communication représente un risque, celui des procès à répétition sur le fondement de « l’incitation à la haine raciale ». En revanche le Système peut difficilement désormais faire taire totalement Eric Zemmour et lui interdire toute apparition dans les médias, quels que seront les propos qu’il tiendra, compte-tenu de son statut de candidat et des 2,5 millions de voix obtenues.

Les échecs répétés de Marine Le Pen ont surabondamment démontré que la stratégie de dédiabolisation était vaine et perdante. Pire, elle renforce le Système, en lui permettant de disposer d’une opposition officielle, l’une d’extrême-gauche l’autre d’extrême-droite, aussi inoffensives l’une que l’autre. Jouer au plus fin avec le Système et ses médias et chercher à les amadouer est voué à l’échec. La communication de rupture est la seule chance de faire bouger les Français apathiques, défaitistes et résignés.

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